Les tableaux de la chartreuse de Saïx dans les églises de Castres

A propos de tableaux du XVIIe siècle

« Dans ses Mémoires, publiés en 2004 par la Société culturelle du Pays Castrais, Anacharsis Combes évoque le sort pendant la Révolution des tableaux de la Chartreuse de Saïx.

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Saint Jean-Baptiste, école Lesueur, cathédrale Saint Benoît

Dans la première partie du texte (période 1797-1805), il écrit : Quelques tableaux appartenant aux églises dépouillées pendant la Révolution reposaient contre les murs [de la chambre de mon grand-père], leur toile sans peinture à l’extérieur. Là, un amateur aurait pu reconnaître le Saint Jean et le Saint Bruno de Le Sueur, que mon grand-père rendit plus tard, le premier à Saint-Benoît, le second à Saint-Jacques [de Villegoudou], quand il eut été nommé successivement marguillier* des deux églises. »

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Saint Bruno, école Le Sueur ? église Saint jacques, Castres

Le tableau de l’église Saint-Jacques représente saint Bruno en prière. Né en Allemagne vers 1030, Bruno poursuivit ses études à Reims, y devint chanoine de la cathédrale, recteur de son école puis chancelier de l’archevêché local. En 1084, il prit la décision de se retirer du monde et de vivre en ermite, avec six compagnons, dans le Désert de Chartreuse, près de Grenoble. Le tableau montre Bruno en prière dans une grotte, les mains jointes, un livre devant lui, un crâne à ses pieds. La grotte souligne sa qualité d’ermite, le crâne constitue un rappel permanent à la vanité des choses terrestres. Trois compagnons de l’ermite sont assis devant l’entrée de la grotte ; entre eux apparaît une petite cabane, préfiguration des cellules  individu-elles des chartreux. A l’arrière-plan se dressent des sommets enneigés.La présence d’un Saint Jean-Baptiste au désert dans l’univers chartreux n’est pas étonnante : Bruno a vécu à son exemple comme ermite dans le désert […]

L’évocation des seuls tableaux représentant saint Jean et saint Bruno parmi l’ensemble des œuvres de la Chartreuse sauvées n’est pas anodin ; leur attribution à Le Sueur non plus, même si elle ne constitue pas une preuve. Dans son ouvrage Biographie et chroniques castraises, Magloire Nayral parle aussi du Saint Jean de Le Sueur  (t. IV, p. 135 – 1837). La réalisation de ces deux toiles par Eustache Le Sueur (1616-1655), l’un des fondateurs de la peinture classique française, parfois surnommé le Raphaël français, ne serait pas surprenante ; ses relations avec les Chartreux sont connues : il a notamment exécuté pour la Chartreuse de Paris une suite de 22 tableaux sur la Vie de Saint Bruno (aujourd’hui au Louvre). L’attribution à ce peintre des deux toiles castraises, d’excellente facture, confirmerait leur valeur patrimoniale.

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Saint François d’Assise, Llanos Y Valdès, Musée Goya

Saint François d’Assise, Llanos Y Valdès, Musée Goya, Castres Les tableaux sont caractéristiques du baroque français : attitudes et mouvements des corps, abondance des détails, mais sans surcharge excessive… Sans doute serait-il intéressant de les mettre en regard de quelques-uns des tableaux du siècle d’or espagnol, présentés au musée Goya : le Saint François d’Assise en prière de Sébastián Llanos y Valdès, le Martyr chartreux de l’école de Zurbarán…

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Martyr chartreux, école de Zurbaran, Musée Goya

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Saint Bruno, école Lesueur, cathédrale Saint Benoît

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Billet de la Société culturelle du Pays Castrais, n° 5 / 2009. Extraits de l’article de M. Aimé Balssa

*marguillier. Membre du conseil de fabrique chargé d’administrer les biens d’une paroisse, sous l’Ancien Régime et sous le Concordat.

 

 

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